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13 janvier 2009 2 13 /01 /janvier /2009 08:00
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13 mars 2008 4 13 /03 /mars /2008 06:21

Appel du Comité pour la défense du Parc de La Calle

"Malgré la promesse ferme du Gouvernement par la voix de son Ministre des Travaux Publics en date du 04 juillet 2007, une armada de gros engins de travaux publics vient de franchir les limites du Parc National d’El Kala.
Depuis bientôt un mois, ces mastodontes défrichent et nivellent activement l’assiette du tronçon de l’autoroute Est-Ouest qui doit traverser cette partie du territoire national classée aire protégée depuis 1983 en raison de l’inestimable patrimoine naturel qu’elle abrite"


Il faut savoir que la même autoroute a commencé il y a des années-- et continue-- à faire des ravages dans ces archives du sol que sont les vestiges archéologiques à travers l'Algérie entière et pas seulement dans la région de La Calle. Des milliers de sites historiques de toutes les époques sont ainsi détruits, pour toujours, dans l'indifférence générale et malgré une batterie de lois censées protéger le patrimoine archéologique.

 

Remarque :  Cette même autoroute est-ouest anéantit sur toute la longueur du pays, et pas seulement dans la région de La Calle, les milliers d'archives du sol que sont les vestiges archéologiques sans que personne ne s'émeuve!  Malheureusement, il n'y a pas dans le milieu des archéologues et autres spécialistes du Patrimoine de conscience ou de mobilisation comparables à celle du comité "Parc National d'El Kala". Quant à moi, je me contente d'aboyer sur mes sites et blog, et la caravane des monstres mécaniques destructeurs passent...... 

 

J'aurais pu répondre à vos questions si le ministère de la Culture avait imposé la présence d'une équipe d'archéologues (dont je suis) sur le tracé de cette autoroute. Si j'attire votre attention, c'est justement parce que le massacre accompagne les chantiers de cette maudite autoroute sur tout son tracé! Dites-moi quand et comment nous pourrions nous rencontrer. Si l'un d'entre vous est libre aujourd'hui à 18h, je suis invitée par le Rotary d'ALger à donner une conférence à l'Aurassi; venez, vous pourriez vous faire une idée de l'étendue du désastre. En tout cas, merci d'avoir répondu.

 

Parc national d’El Kala / Autoroute Est-ouest
Pour mieux comprendre le problème et éviter des confusions

Les travaux pour la réalisation du tronçon d’autoroute d’une vingtaine de Km (17,5 km) qui traversent le parc national d’El Kala ont été lancés et sont bien avancés. Pour l’instant il s’agit des travaux de défrichement et de terrassement de l’assiette de l’autoroute qui a une emprise de 120 m de large.
Le parc national d’El Kala (PNEK) est un territoire classé de près 80 000 hectares (800 km²). C’est une institution de l’Etat algérien créée par le décret n° 83-458. Elle a pour but de protéger le patrimoine naturel qu’il renferme. Ce dernier est considéré comme exceptionnel et d’importance internationale pour les raisons suivantes :
     Contrairement aux parcs nationaux des autres régions de la planète comme c’est le cas aux USA, au canada, en Europe ou sous les tropiques qui concernent plutôt de grande unités écologiques homogènes,
c’est une mosaïque de milieux divers et variés sur un territoire relativement peu étendu. Autrement dit, on traverse plusieurs écosystèmes originaux en parcourant seulement quelques kilomètres. On en a identifié une vingtaine pour l’instant. Les recherches se poursuivent tant bien que mal….
     Le parc national d’El Kala, avec le nombre d’espèces végétales (1264 espèces soit 32% de la flore nationale) et animales (878 espèces) qu’il abrite, classées rares, très rares ou rarissimes selon les standards mondiaux (CITES et UICN) et les listes algériennes (loi et décrets),
est un réservoir de la biodiversité de la région méditerranéenne elle-même considérée comme un cas à part à la surface de la planète pour être de faible étendue mais l’origine des principales espèces cultivées aujourd’hui pour l’alimentation et la santé de l’humanité.
    A l’échelle régionale, il se distingue par
la juxtaposition sur quelques Km de milieux naturels qui appartiennent à des régions géographiques aujourd’hui très éloignées les unes des autres : la région semi aride de l’Afrique du nord et la région de l’humide du nord de l’Europe (aulnaies et tourbières). Ainsi on rencontre des paysages qui contrastent avec le reste du Maghreb.
     A l’échelle régionale encore, et avec ses nombreuses zones humides (lacs, étangs, marécages, sols détrempés, aulnaies…) il offre des sites d’hivernage mais aussi de nidification aux oiseaux migrateurs. C’est une étape vitale dans la grande voie de migration ente l’Europe occidentale et l’Afrique. Avec le lac Tonga,
Le parc national d’El Kala renferme la principale zone de nidification d’Afrique du nord pour les oiseaux d’eau dont certains sont en voie de disparition.

La grande diversité biologique d’El Kala, qui se traduit pour le visiteur par ses paysages variés et divers, a été observée depuis fort longtemps. Des écrits arobo-musulmans mais aussi européens l’ont rapporté depuis le XIV siècle. L’aire protégée du parc national d’El Kala ne sera crée elle qu’en 1983 dans le sillage de la prise de conscience universelle de la protection de la nature qui a marqué les années 60 et 70. Les aires et les espaces protégés se sont alors imposés comme l’instrument privilégié d’aménagement du territoire en matière de conservation in situ de la nature. En Algérie les parcs nationaux sont nés avec la première loi sur l’environnement (83-03 du 5 février 1983) dans la déferlante de textes législatifs pour la protection de l’environnement du début des années 80.
Sa mission est clairement définie dans le statut des parcs nationaux (décret n°83-458 du 23 juillet 1983)  entre autres :

La conservation de la faune, de la flore………tout milieu naturel représentant un intérêt

La préservation de ce milieu contre les interventions susceptibles de modifier son aspect, sa composition et son évolution

Le développement d’activités en rapport avec la nature

L’implantation d’une infrastructure touristique dans la zone périphérique

Pour ce faire, des études ont été menées pendant plus de deux ans pour élaborer un document, le schéma directeur d’aménagement aujourd’hui on dirait plan de gestion, qui est en quelque sorte le mode d’emploi que doit suivre le gestionnaire du parc. Ce document a été approuvé par les autorités centrales et ensuite par l’APW d’El Tarf en avril 1986.
Selon la nature du terrain et la distribution des milieux qui sont évalués selon les classifications des différentes espèces qu’on y sont implantées, on affecte une classe de protection à des zones du parc ainsi identifiées. Les statuts des parcs (décret 83-458) en prévoir 5 :

La classe I : dite de Réserve Intégrale où toute intervention est interdite

La classe II : dite Primitive ou Sauvage où est interdite toute construction de route, d’ouvrages qui modifient l’ambiance naturelle

La classe III : dite de Faible Croissance où des transformations peuvent être réglementées

La classe IV : dite Tampon qui sépare les trois premières de la dernière

La classe V : dit Périphérique où sont autorisées toutes formes de construction avec la précision suivante : c’est la seule qui peut être traversée par des routes importante (article 4)

Ce travail abouti à un l’outil de gestion fondamental de l’aire protégée : son zonage

 

Comité pour la Sauvegarde du Parc National d’El-Kala

Communiqué

Malgré la promesse ferme du Gouvernement par la voix du Ministre des Travaux Publics en date

du 04 juillet 2007, une armada de gros engins de travaux publics vient de franchir les limites du

Parc National d’El Kala.

Depuis bientôt un mois, ces mastodontes défrichent et nivellent activement l’assiette du tronçon

de l’autoroute Est-Ouest qui doit traverser cette partie du territoire national classée en aire

protégée depuis 1983 pour l’inestimable patrimoine naturel qu’elle abrite.

En dépit de l’article 4 du Décret Présidentiel N°83-458 du 23/07/83 portant Statut des Parcs

Nationaux qui interdit formellement le passage d’une route importante et des engagements des

pouvoirs publics de sursoir à la réalisation de ce tronçon, les travaux ont été lancés sans même

rechercher d’autres alternatives.

La réalisation de ce tronçon annonce un génocide écologique : 1264 espèces végétales et 878

espèces animales dont, certaines, uniques en méditerranée vivent dans ce parc.

Cette violation de la Loi et des engagements internationaux de l’Algérie porte également un coup

fatal à la seule protection juridique du parc national : son statut. A l’avenir, ce décret présidentiel

ne pourra plus être mis en avant pour sauvegarder ce qui peut l’être encore. C’est la voie ouverte

à toutes les dérives.

Ce n’est pas une fatalité. L’autoroute n’est pas encore construite.

Il faut empêcher cela coûte que coûte !

Sauver le patrimoine naturel du parc, c’est empêcher que son statut ne soit foulé aux pieds.

Nous, citoyennes, citoyens, associations, scientifiques, étudiants, etc. nous nous élevons contre

le massacre de ce fleuron de la nature de notre pays et celui de la biodiversité en Méditerranée.

Dans la pétition que nous adressons (www.sauvonsleparc.org) au Président de la République,

garant de l’application de la Loi, nous demandons l’arrêt immédiat des travaux et la recherche

d’un autre itinéraire comme promis par le Ministre des Travaux publics le 04 juillet 2007 lors de

sa rencontre avec le collectif de scientifiques et de défenseurs de l’environnement.

Nous ne sommes pas contre l’autoroute comme on cherche à le faire croire. Nous voulons à la

fois l’autoroute et l’intégrité du Parc National.

C’est possible ! Il suffit de choisir parmi les tracés proposés, celui qui préserve le Parc en

respectant la Loi.

Une telle décision rehaussera le prestige du pays qui aura su allier la préservation d’une aire

protégée et l’autoroute comme vecteur de développement.

Nous sommes déjà plus de 12 000 signataires de la pétition et la mobilisation se poursuit.

Pour la coordonner et l’amplifier un comité national vient de voir le jour.

Rejoignez-nous sur le site www.sauvonsleparc.org

Contact : contact@sauvonsleparc.org

Le 15 février 2008

 

 

Une aire protégée, selon les concepts de la conservation de la nature qui incluent le développement durable, laborieusement élaborés au fil des ans par la communauté internationale, est un type d’aménagement du territoire et de l’espace qui doit par définition s’étendre au fil de la démonstration et de la prise de conscience. La fragmentation d’une aire protégée est le pire de ce qui peut lui arriver. C’est sa négation. L’autoroute va couper le parc en deux fragments.
On ne pourra pas non plus prétende faire de la conservation de la nature selon les standarts internationaux et participer à cet effort mondial en suivent les règles les plus éventaires.
Nous aurons des parcs nationaux spécifiques, encore, qui n’en porteront que le nom. On rétorque ici que des pays « avancés » ont des autoroutes qui traversent des parcs nationaux. C’est vrai, mais c’est à la lumière de leurs expériences qui datent de 20 ans et plus que partout maintenant on s’y oppose fermement. Il y a 25 ans cela n’aurait certainement pas posé de problème mais c’était avec un autre savoir.
Quand à cette arlésienne d’étude d’impact qui reste incertaine et douteuse tant qu’elle n’ pas subit le filtre de la critique et que l’on brandit comme la caution morale, juridique et scientifique pour faire passer l’autoroute, elle ne se justifie en aucune manière pour le tronçon dans le parc puisque la loi a déjà tranché :
pas d’autoroute dans le parc.

Voilà pourquoi l’autoroute ne doit passer par le parc. Son patrimoine est inestimable pour nous avec tout ce que cela suppose en développement d’activités en rapport avec la nature, dont le tourisme et l’agriculture « verts », mais aussi pour toute l’humanité au titre de réservoir de biodiversité. En le traversant l’autoroute va anéantir la seule et unique Loi qui protège son territoire, sont statut. Après cela, on ne pourra plus rien opposer aux pressions qui se font de plus en plus fortes et menaçantes.


 

Par : Rafik Baba-Ahmed (Ancien directeur du PNEK)

Les caractéristiques du projet :

Linéaire : 1216 Km

Profil en travers : 2x3 voies

Vitesse de base : 100 à 120 Km/h

Nombre d'échangeurs : 60 échangeurs environ (avec option de péage)

Principales villes desservies : El Tarf, Annaba, Constantine, Chelgoum Laîd, Sétif, Bordj Bou Arréridj, Bouira, Alger, Blida, Aîn Defla, Chlef, Relizane, Oran (par une pénétrante), Sidi Bel Abbés, Tlemcen.

Équipements : Aires de repos, stations service, relais routiers et centres d’entretien et d’exploitation de l’autoroute

On peut lire ici ou là qu’il« a été tenu compte

de l’impact de l’autoroute sur

la protection des ressources

en eau souterraines et superficielles,

aux déboisements, à

l’agriculture, les mises en

dépôt, les emprunts et les

effets sur le milieu physique.

Pour le rétablissement systématique

des routes nationales

et des chemins de

wilaya il est prévu la création

d’ouvrages de franchissement

d’autoroute. Pour les

cimetières touchés par l’autoroute,

le déplacement des

tombes se fera dans un site

indiqué par les responsables

de la commune concernée.

Pour le patrimoine culturel et

archéologique, toutes les

mesures nécessaires sont

prévues pour la préservation

de ce potentiel »

 

La réalisation du grand projet de l'autoroute estouest,

longue de plus de 1 200 kilomètres, amorce

enfin, cette année, son véritable démarrage. Il

aura fallu, en effet, que le Président de la

République prenne la décision de le financer sur le

budget de l’Etat pour que la situation se débloque.

Retour sur l'historique d'un projet grandiose qui

dure depuis plus d'une vingtaine d'année et qui ira

à son terme en 2009.

 

Etat récapitulatif du futur réseau autoroutier en Algérie

d'un linéaire estimé à environ 4 500 km

Linéaire

1216 kilomètres

65 kilomètres

140 kilomètres

300 kilomètres

100 kilomètres

1200 kilomètres

1517 kilomètres

4452 kilomètres

Désignation

L'autoroute est-ouest,

La 2° rocade d'Alger

De la 3° rocade plus au Sud d'Alger

De la 4° rocade encore plus au Sud

La liaison autoroutière : le port de Jenjen / les Hauts

Plateaux

La rocade des Hauts Plateaux, liaison Est-ouest,

desservira les agglomérations situées entre la frange

Nord du pays et le désert ;

Les liaisons Nord-Sud au nombre de 8 d'un linéaire

total d'environ 1517 km, appelées pénétrantes relient

notamment l'autoroute est-ouest à la rocade des

Hauts Plateaux

TOTAL

 

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18 février 2008 1 18 /02 /février /2008 06:59

« Accepter un poste comme celui-ci, c’est beaucoup de courage, mais j’aurais doublement le courage de le quitter à l’instant où je comprendrais que ce n’est pas véritablement ma place », a déclaré l’écrivain Yasmina Khadra à propos de sa nomination à la tête du Centre culturel algérien, dans un entretien avec le quotidien l’Expression.

« Non, ce n’est pas une promotion, c’est une mission. Car j’étais sur un nuage, et maintenant je suis descendu beaucoup plus bas. Mais je le fais pour les gens qui attendent de moi quelque chose », a-t-il poursuivi.
L’écrivain avoue n’avoir lancé pour l’instant aucun projet : « Je cherche. Rien ne sert de courir, il faut partir à point. Je suis quelqu’un de très prudent. J’essaie donc de construire d’une manière assez raisonnable les projets que j’ai en tête. J’ai besoin pour cela d’une équipe, et de tous les Algériens. Si on veut transmettre la culture, ce n’est pas le problème d’une personne, c’est le souci de tout un peuple. Donc j’ai besoin de tous les artistes, tous les intellectuels. »
Précisément, à écouter l’écrivain, ces artistes et ces intellectuels ne se bousculent pas devant la porte du Centre culturel algérien. « Il y en a qui viennent, il y en a d’autres qui continuent de considérer tout ce qui est algérien comme quelque chose de suspect. J’espère un jour qu’ils vont s’éveiller à eux-mêmes, parce qu’ils sont vraiment dans le ridicule. »
Yasmina Khadra affirme  que l’Algérie lui inspire un « sentiment de colère » jusqu’à aujourd’hui. « Parce qu’à chaque fois que j’y retourne, je vois que la corruption est montée d’un cran, que la prédation s’accentue. Il y a quand même des espoirs.Il y a des gens qui ont conscience de cette dérive, et qui essaient de réagir d’une manière assez intelligente. Sauf qu’ils manquent de moyens.
(…)  J’aime ce pays, pour le mal qu’il m’inflige, pour les espoirs qu’il suscite en moi. Je sais qu’il suffit d’une présence d’esprit.
Alors, nous sommes en train de traquer cette présence d’esprit. Un déclic, un petit déclic et l’Algérie va repartir.

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18 février 2008 1 18 /02 /février /2008 06:34

Répondant à son ami Mohamed-Chafik Mesbah qui s’étonnait de sa nomination au poste de directeur du Centre culturel algérien de Paris, l’écrivain Yasmina Khadra s’explique sur les raisons qui l’ont conduit à accepter de diriger l’institution culturelle parisienne tant convoitée.

 

Chafik Mesbah : «Je suis étonné par ta disponibilité empressée»

 

(…) Nous sommes tous deux militaires, du moins le suis-je resté personnellement, dans mon habitus social et culturel. Pas question de nous raconter, mutuellement, «des histoires». Autant que de nombreux intellectuels algériens, je suis pour le moins étonné par cette tournure des événements, non pas tant, d’ailleurs, de l’offre qui t’a été faite que de ta disponibilité empressée à assumer la tâche.

 

Je me refuse par rigueur morale de juger des décisions des uns et des autres, même s’il s’agit d’amis chers. (…) C’est dire que ton cas, aussi bien, je ne me considère pas habilité à juger de tes décisions même si, effectivement, je suis un peu blessé, au fond de moi-même, que tu aies accepté cette offre. Tu es, après tout, seul responsable devant ta conscience.

 

C’est à ton bilan, au demeurant, que le peuple algérien, et plus sûrement, l’histoire auront à te juger. J’ai appris par la bande que cette désignation avait été initiée par des contacts préalables entre le président de la République et toi-même. J’ignore de quoi vous avez discuté, mais je suppose qu’il y a eu un plan de charges adopté qui agrée les deux parties. C’est ce plan de charges, implicite ou explicite, qui me préoccupe.

 

J’évoque, sans transition, le plan de charges pour exclure l’hypothèse triviale que certains milieux avancent pour expliquer ta nomination. Ceux-là supposent, en effet, que ta nomination répondrait à une pure logique de clan que conforterait un soubassement régionaliste. Le cercle présidentiel veut quelqu’un à lui à un poste jugé important pour l’image du régime, voilà tout. Te connaissant suffisamment, grâce à nos échanges intellectuels, grâce à nos rencontres et surtout, grâce à l’avis autorisé de ceux qui t’ont fréquenté sur les bancs de l’école des cadets de la Révolution ou au sein des unités de combat de l’ANP, je suis enclin à penser que tu es inaccessible à cette logique d’incultes ou, pour le mieux, de «ripailleurs». On ne transite pas impunément par les écoles des cadets de la Révolution si chères aux yeux du défunt président Boumediene. Devisant, tantôt, avec un ancien de tes condisciples, je lui ai, à cet égard, posé, brutalement, cette question : «Actuellement, la chaîne de commandement militaire est composée, essentiellement, d’officiers issus des écoles des cadets de la Révolution. Penses-tu que l’origine géographique des uns et des autres puisse affecter la cohésion de leur groupe ?» La réponse a fusé d’un jet : «Non, certainement pas !»

 

6. Il reste, alors, le plan de charges en lui-même. La «carte blanche» du président de la République évoquée par la presse nationale, ce serait, en somme, la garantie d’un projet de portée stratégique pour le renouveau de la culture algérienne ? Quitte à faire transiter un tel projet par Paris ? J’aurais tant voulu que cela soit vrai, après tout l’Etoile nord africaine, précurseur du mouvement nationaliste en Algérie, a bien pris naissance dans les milieux ouvriers de l’émigration algérienne en France. C’est là, hélas, un simple raccourci. Ma religion est faite en ce qui concerne la possibilité pour le système de se réformer de l’intérieur. L’hypothèse la plus vraisemblable, c’est une collision frontale entre la société virtuelle (le système, ses appareils et ses instruments) et la société réelle (la majorité de la population délaissée à son sort et subissant des conditions d’existence de plus en plus pénibles). Dans le processus qui mène à cette issue fatale, c’est l’étranger, bien plus que les élites nationales, qui disposera d’une influence significative. Comment un système tombé en obsolescence clinique — quoique encore résistant aux assauts qui lui sont donnés de l’intérieur — pourra ménager cette fenêtre dont tu peux, de bonne foi, rêver ? La liberté est indissociable, il est impossible de verrouiller l’espace politique, de fermer le paysage médiatique puis de laisser croire que la culture va connaître sa révolution !

 

7. De manière plus pesante, je suis saisi par la crainte, à propos de ce plan de charges, que ta notoriété ne soit détournée à des fins politiciennes. Nous avons eu, tous deux, l’occasion de discuter de nos fortes préventions contre la hiérarchie militaire. Autant que toi, je suis consterné par le niveau d’inaptitude intellectuelle et, parfois même, l’incurie morale de certains de nos si vaillants chefs. Cela dit, je refuse d’être la main par laquelle on brandira le couteau destiné à poignarder la famille. Accepteras-tu de l’être ? Je ne nourris pas d’a priori idéologique, ni d’animosité personnelle, je sais bien que la politique c’est l’art du possible. L’un des seuls domaines, d’ailleurs, où le bilan du président de la République trouve grâce à mes yeux, c’est bien l’image de cette bouffée d’oxygène introduite dans la hiérarchie militaire où, désormais, tes compagnons cadets peuvent aspirer à accéder aux véritables commandes, je dis bien aux véritables commandes. En attendant, cependant, le tour de mes propres anciens compagnons, lorsque le souffle de rajeunissement et de professionnalisation frappera fort aux portes de leur corporation.

 

8. Ce n’est pas une démarche idéologique qui me conduit à t’interpeller. C’est une pure déduction empirique. J’ai toujours affirmé que la démarche du président de la République se distinguait par l’absence d’un projet national de portée stratégique. Sans jamais nier, pour autant, l’habilité tactique de l’homme ni sa capacité manœuvrière. Je suppose qu’il n’ignore rien de ton véritable état d’esprit concernant les usages passés au sein de nos forces armées. Il suffit de bien lire tes romans pour s’en imprégner car, nous en avons déjà parlé, chaque œuvre que tu as produite est un fragment de ta vie. Il existe, par conséquent, le risque que ta fougue de romancier, ta verve d’écrivain et ta candeur de militaire – oui je dis bien ta candeur de militaire – ne soient mobilisées pour discréditer l’ancienne hiérarchie militaire. A travers la contre-image que tu produirais toi-même et l’écho qui résonnerait des plumes et voix incontestables que tu pourras rassembler.

 

9. J’ai tenu à m’exprimer avec toi de la manière la plus franche, en espérant ne pas t’avoir blessé et, en te recommandant, excuse-moi l’expression, «de ne pas vendre ton âme au diable», si tant est que cela soit à l’ordre du jour. Je crains que tu ne sois, à ton corps défendant, entraîné à faire «la sale besogne», exactement comme tel personnage se targue du bonheur de l’effectuer, dans l’autre sens. Pour le reste, je veux te rassurer. Mon amitié t’est acquise ainsi que ma sympathie, en toutes circonstances.

 

Cordialement, Mohamed-Chafik Mesbah

 

Yasmina Khadra : «C’est un sacrifice pour moi d’accepter ce poste»

 

 

Ta franchise me rassure, cher frère. Et me touche. Ainsi s'inquiètent les amis pour leurs amis. Mais, crois-moi, il n'y a pas le feu. Cette nomination m'a surpris, moi le premier. Je l'ai acceptée par humilité. Elle ne m'apporte rien de bon, à tous les niveaux. Mais elle est une tâche comme tant d'autres, et j'ai accepté de l'assumer POUR TOUS LES ARTISTES ET LES INTELLECTUELS qui ont besoin de mes services. TOUS LES ARTISTES ET INTELLECTUELS indésirables, persona non grata comme je l'ai été, moi-même, dans ce centre. Tu ne peux pas imaginer ni mesurer le soulagement de cette élite tant marginalisée depuis qu'elle a appris que j'étais à la direction du CCA. Je reçois tous les jours des appels enthousiastes, des projets ressuscités, des espoirs fous. Comment peut-on être si bas et si stupide pour croire ou faire croire que cette nomination me profiterait personnellement lorsque mon lectorat et mon éditeur craignent de voir leur auteur détourné ? Comment peut-on être si expéditif en parlant de course au "koursi", moi qui dispose d'un trône plus beau que celui des rois : Ma Liberté! ? Comment peut-on soupçonner une quelconque tentation pécuniaire, à ce poste, quand, en restant au chaud chez moi, confortablement installé dans ma paresse, dormant quand je veux et me levant comme bon me semble, je gagne largement ma vie. Mon problème est que j'aime mon pays. Je n'en ai pas d'autre et je l'ai toujours servi avec mes tripes et mes rêves les plus ridicules. C'est un sacré sacrifice pour moi que d'accepter ce poste, sauf qu'il se trouve que d'autres ont donné plus que leur liberté pour nous tous, qu'ils ont donné leur VIE, en nous léguant leurs veuves et leurs orphelins. J'ignore comment fonctionne l'esprit des nôtres, de certains des nôtres car ils sont nombreux ceux qui ont compris mon geste et s'en réjouissent. Mais ne l'ai-je pas dit mille fois, écrit noir sur blanc ? On ne peut redresser les esprits retors sans les casser. Les gens nobles reconnaissent tout de suite la beauté des engagements sains. Quant aux minables, ils ne sauront déceler la grandeur chez les autres. Ils ignorent ce que c'est. Ils ne peuvent même pas accéder à l'estime qu'ils devraient avoir pour leurs propres personnes. Je suis ce que j'ai toujours été : un brave fils de l'Algérie. Je n'ai jamais trahi, jamais triché, jamais renié les miens, et j'ai toujours eu le courage de mes convictions. Ce n'est pas le Centre culturel algérien qui rehausse le prestige d'un écrivain comme moi, c'est moi qui lui donne une allure, une vocation, une crédibilité en le ravissant aux prédateurs de tout poil et aux fonctionnaires encroûtés, aussi enclavés culturellement que les enclos à bestiaux. Par ailleurs, la confiance que m'accorde le président de la République est, à elle seule, une révolution. C'est historique. C'est la première fois qu'un chef d'Etat algérien confie une tâche importante à un écrivain qui n'est pas du sérail et qui a toujours été virulent à l'encontre du régime. Je n'ai pas le droit de condamner cette ouverture. Peut-être sommes-nous enfin en train d'accéder à la maturité ? Peut-être le pouvoir se rend-il enfin compte que l'élite est là pour l'éclairer et non pour le vilipender, qu'il est temps de la mobiliser autour d'un idéal commun au lieu de la marginaliser avant de la livrer poings et pieds liés à la manipulation étrangère comme c'est le cas d'un important contingent de nos intellectuels en France, dépités d'être ignorés et traités en parias par ceux-là mêmes qui devraient les porter aux nues ? Etonnant que l'on change d'avis du côté du pouvoir, et pas du côté de ceux qui sont censés incarner l'intelligence et la générosité ? Je ne suis l'ennemi de personne. Ma colère est saine, sans haine ni frustrations. Je suis aussi libre que le vent, aussi intègre que mes serments. Je ne suis ni à vendre ni à louer. Je suis tellement sûr de mon honnêteté que je ne crains ni les pièges ni les récupérations. Je vais là où mon cœur me dit d'aller, désintéressé parce aucunement dans le besoin, entier parce que j'aime mon pays. Je sais, c'est une rengaine vieille comme le plus vieux métier du monde, mais il se trouve que je suis aussi vieux que la naïveté, aussi vieux que la pureté aussi. Tu me ferais un grand plaisir si tu publiais cette lettre dans le Soir d’Algérie. Il faut que les choses soient claires même si, forcément, les nuisances et les infamies relèvent de la noirceur et des opacités.

 

Ton ami, Mohammed Moulessehoul,

 

alias Yasmina Khadra,

 

bédouin parce qu'authentique,

 

Algérien parce qu'il sait ce que ça signifie

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8 février 2008 5 08 /02 /février /2008 20:09
J'étais à l'initiative et la responsable de la création en novembre 2006 de l'association l'aurésienne kahina à lyon. Découvrant que les objectifs n'étaient plus les même, j'ai donc créé une nouvelle association "Auressienne Kahina Tamazight" dont je suis la présidente pour continuer la promotion de la culture dans des objectifs bien définis. Ceci permettra entre autre d'avoir une diversité d'action. Les coordonnées restent inchangées, ce n'est qu'une continuation de ce qui a été entrepris depuis plus d'un an.



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Présentation D'a.k.t

  • : Association Auressienne Kahina Tamazight
  • : Association pour la promotion de la culture tachawit et la sauvegarde du patrimoine auressien, solidarité avec le peuple
  • Contact

Profil

  • Dyhia
  • Présidente de l'association Auressienne Kahina Tamazight, pour la promotion de la culture berbère chawie en france et dans les aurès
  • Présidente de l'association Auressienne Kahina Tamazight, pour la promotion de la culture berbère chawie en france et dans les aurès

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